Le temps liquide
Comment ne pas être ému par Le voyage de Clermont-Ferrand, en point d'orgue du recueil, rencontre dans un train où se joue ce vertige d'identités jusqu'au deuil du fils aimé ?
Et au mot du jeune Oumar qui passe au "tu" comme un fils nouveau ou ressuscité ?
Juste avant le cauchemar où l'auteur voit son squelette sortir de sa propre peau, comme dans une vanité quotidienne.
La veine autobiographique palpite dans ces récits, et dans le dernier, avec le nom même de Nimrod...
Le premier récit, à Venise où "Jamais bain d'iode n'abolira le hasard", annonce la navigation de nos destinées, avec ou sans dés, qui remuent et stagnent, courent entre l'extrême beauté et l'extrême laideur, même quand les anges donnent rendez-vous aux carrefours dans l'impudeur inqualifiable de l'harmonium et que l'horizon des Sahéliens "résonne avec la poussière"...
Les tesselles de cette mosaïque des quatre éléments sont placées avec tellement d'humour, aussi, et de bonheur.
La vraie profondeur, c'est ce que l'écrivain monte et montre à la surface.
Au fil du temps, au fil de l'eau, au fil de l'écriture et de la vie.
Né au Tchad, Nimrod a enseigné à N’Djamena et Abidjan, avant de venir en France où il se consacre à l’écriture.
Il a été rédacteur en chef de la revue Aleph, beth de 1997 à 1999 et coanime depuis 2003 la revue Agotem.
Il a consacré deux essais au poète sénégalais Léopold Sédar Senghor (Tombeau pour Léopold Sédar Senghor).
Poète, romancier à la langue subtile et précise, Nimrod arpente les traces de la mémoire, en particulier celle de l’enfance et de l’adolescence dans ses romans Les Jambes d’Alice et Le Bal des Princes, et dans son récit Le Départ.