Il se confie à nous et revient sur sa carrière à l'occasion de la sortie de l'album "Sangre Animal", co-réalisé avec Bernardo Sandoval.
Quand avez-vous décidé de consacrer votre vie à la musique ?
Paamath : La musique est venue vers moi comme je suis allé vers elle dans une approche autodidacte ! Nous avons appris à nous connaître et nous nous sommes épris l'un de l'autre. Je ne me suis jamais vraiment dit "bon, je vais consacrer ma vie à la musique...". C'est un fait de tous les jours qui m'accompagne depuis l'enfance. Pour moi la musique fait partie de la vie.
Vous avez visité dans votre jeunesse le studio de Bill Wyman, le bassiste des Rolling Stones. Pouvez-vous nous parler de cette expérience ?
Paamath : C'était une époque où j'ai dû accompagner en Angleterre un milliardaire pour qui je travaillais en tant que chauffeur. Profitant de ce séjour, je suis allé rendre visite à mon ami Luis Gonzalez qui, lui, travaillait dans la demeure de Bill Wyman (bassiste des Rolling Stones).
C'est dans l'une des dépendances de ce lieu prestigieux, où j'ai habité pendant une semaine, que j'ai découvert le 4 pistes TASCAM d'époque et une multitude d'instruments collectionnés n'attendant que moi pour les faire sonner à nouveau ! Chose que j'ai faite avant de retourner rejoindre mes copains musiciens en France avec lesquels nous avions le projet de monter un groupe, profitant de mes premières compostions made in England !
Quels souvenirs gardez-vous de votre premier groupe, "Exil" ?
Paamath : Des souvenirs d'amitié, de fraternité et surtout de musicalité entre les membres fondateurs du groupe EXIL.
Nous nous étions exilés à la montagne, à Moulinet, tout petit village situé au-dessus de Menton dans le sud de la France. Nous y avions négocié, avec le maire du village, une maison des jeunes que nous pouvions occuper à longueur d'années et dans laquelle nous répétions tous les jours notre répertoire en création. Bien sûr, en échange, il nous fallait manier la pelle et la pioche le matin pour l'entretien de ce tout petit et magnifique village.
Nous étions très sérieux dans notre travail musical. Cela nous a donné la rigueur, la persévérance et la dignité de ce que représentait pour nous la Musique.
Quel bilan faites-vous de votre collaboration avec Francine Tièche, avec qui vous avez formé le duo "Buru" pendant dix-sept ans, et sorti trois albums ?
Paamath : Francine Tièche fut en effet pendant de longues années ma moitié musicale.
Après la séparation du groupe EXIL, nous avons créé le duo Buru. Munis de nos instruments respectifs (guitare, flute, saxophone et voix), nous avons promené notre musique originale à travers bien des coins du monde. De ce fait, nous avons appris le métier avec de nombreux concerts et scènes, et des rencontres multiples, toutes aussi riches les unes que les autres.
Il reste de cette collaboration trois albums signifiant le duo Buru : une musique précise, sensible et généreuse, tout comme l'était mon amie Francine Tièche qui nous a quittés en 2008.
Vous avez assuré les premières parties de Youssou N'Dour, Salif Keita, Tinariwen, ou encore Joe Zawinul, Claude Nougaro, Nana Vasconcelos. Avez-vous pu beaucoup échanger avec ces artistes lors de ces occasions ?
Paamath : Oui quelques fois. C'était en effet une chance de pouvoir partager un moment de vie avec ces artistes, à la croisée d'un concert, ou d'une ouverture de spectacle. Dans ces moment-là on a rarement l'occasion de beaucoup échanger, mais l'intensité de ces rencontres éphémères reste éternelle.
Claude Nougaro s'est pris de considération et d'amitié pour nous (le duo Buru), et nous a invités sur scène lors de ses tournées à trois reprises. Nous l'avions rencontré lors du festival "Alors on chante" à Montauban, alors que nous étions chargé de l'ouverture de son spectacle. Ce fut mémorable.
Salif Keita, nous nous étions produits avant un de ses spectacles en 1995, à la salle Victoire 2, et nous avons un peu échangé avec lui en loge. En 1997, nous avions assuré l'ouverture du spectacle de Youssou N'Dour à Nice au Théâtre de verdure, et nous avons partagé un repas avec lui.
Pour Tinariwen, nous avons fait l'ouverture du spectacle "Run ar Puns" et bu un thé à vert avec lui à l'hôtel. C'était magique. Joe Zawinul, nous l'avons rencontré en 2004 au festival Africajarc. Il nous a invités au Birdland Jazz club en Autriche, à 2 reprises. Nous avons eu un très bon contact avec lui. C'était un grand homme.
En 2008, vous commencez une nouvelle aventure. Pourquoi avoir choisi le nom de scène Paamath ?
Paamath : Je m'appelle Pape Amath N'diaye. Paamath est la contraction de Pape Amath qui est mon prénom.
Comment travaillez-vous avec l'Association Tillié ?
Paamath : Tillié est née il y a bien longtemps, à mes débuts musicaux avec le groupe Exil. C'est nous-mêmes qui avions monté cette association en guise de structure pour être plus crédibles et efficaces dans les démarches administratives concernant la gestion des concerts etc... L'association est productrice essentiellement des quatre derniers albums de Paamath qui est le seul et unique artiste à profiter de ses services.
Comment l'inspiration vous vient-elle habituellement ?
Paamath : Il est difficile pour moi d'associer l'inspiration à l'habitude. L'inspiration est comme un état de grâce qui nous relie avec la création bien sûr mais peut-être au-delà. Il y a comme un rapport avec un autre monde, celui qu'on ne voit pas mais qui se fait sentir, qui touche droit à la fibre émotionnelle. L'inspiration ne souffre en aucun cas l'habitude et peut surgir au moment où l'on s'y attend le moins. En l'attendant, j'essaie d'être sensible et à l'écoute des couleurs que la vie me propose.
Que ressentez-vous quand vous chantez, que vous composez ou que vous jouez ?
Paamath : Je me sens en bonne santé quand je fais de la musique en général. Je suis persuadé que le fait de chanter soigne ou maintient en forme. C'est donc un besoin vital. On chante pour soi ou pour l'autre, partage avec soi ou avec l'autre, don de soi réceptif et sensible... quoi de plus important que l'interaction avec l'être, celui qu'on habite, celui qui nous côtoie, ou celui venu d'ailleurs... On se sent disponible et généreux quand on chante !
Pour votre troisième album sous le nom de Paamath, vous avez collaboré avec plusieurs musiciens très divers, aux percussions, au violoncelle, à la guitare électrique, au violon, à la basse. Comment le travail et les répétitions se sont-ils déroulés ?
Paamath : Le troisième album pour moi a été bien et rondement mené. Comme son nom l’indique c’est un album en Septet live ! Après avoir écumé quelques années de scènes avec cette formation, il nous fallait marquer cette étape par un album live qui traduirait bien l’unité, l’osmose et l’intuition du groupe acquise durant les concerts, les répétitions et le travail jusque-là fournis. La bonne humeur et la vaillance du groupe témoignent d’une entente et d’un sérieux, de la part de tous, nécessaires au bon déroulement du travail et des répétitions.
Que vous apporte la musique dans votre vie ?
Paamath : La musique m’a apporté beaucoup, et je suis allé puiser beaucoup en elle. Faisant confiance au destin, nous nous sommes offerts l’un à l’autre. Une idylle en quelque sorte, avec ses moments de galères et de réussites ne me rendant jamais malheureux, et bienheureux souvent ! Les rencontres, les découvertes, le goût de la scène, les check sound, la douce chaleur des projecteurs, la réflexion, la motivation, la persévérance, le sourire, l’humilité ambiante, la liberté face au choix de vie...
Quels artistes vous ont-ils principalement inspiré sur le continent africain ?
Paamath : Myriam Makeba (Afrique du Sud), Pascal Diatta et Sona Mane (Casamance, Sénégal), Alhadji Baye Konte (Gambie), Kouyate Sori Kandia (Mali), Lalo keba Drame (Sénégal - Gambie), Papa Wemba (Congo), Lokua Kanza (Congo), Solo Cissokho (Sénégal)... et beaucoup d’autres ...
Remerciements chaleureux à Paamath et son attachée de presse Anne-Marie Vignole.
ZOOM
La collaboration avec Bernardo Sandoval
Comment avez-vous collaboré avec Bernardo Sandoval ?
Paamath : Avec Bernardo Sandoval, nous nous connaissons depuis longtemps. C'est un grand acteur culturel, dans les domaines de la musique et du chant... J'avais déjà une grande estime pour le personnage.
C’est il y a 5 ou 6 ans de ça qu’une commande nous a été faites par le conseil départemental de l’Ariège. C’est là que nous avons fusionné nos créations pour en faire un répertoire unique et original.
Peu de temps avant, nous avions fait un jamm sur « Maïmouna », titre que j’enregistrais sur mon album du moment « Le Nom de l’Eau ». Subjugué par l’interprétation et l’inspiration de mon ami Bernardo sur cette chanson, je l’ai invité à participer à l’enregistrement de cette dernière.
Matthias Turcaud