Après plusieurs courts-métrages en prises de vue réelles, fictifs ou documentaires au choix, la togolaise Ingrid Agbo s'est, cette fois, attelée, avec Sacha Perrin-Bayard, à la réalisation d'une série d'animation où l'humour s'allie à un dessein clairement pédagogique.
Dans L'Arbre à Palimpseste, constitué de 104 épisodes de 7 minutes chacun, une grand-mère facétieuse, céramiste et conteuse fait découvrir aux jeunes Iba et Emeka d'éminentes figures de l'histoire de l'Afrique, en lien plus ou moins lointain avec certains soucis ou de situations de la vie des deux garçons : de la guerrière du XVIème siècle Amina de Zaria au fondateur du royaume zoulou, Shaka Zulu, en passant par la téméraire Ngola Mbandi Nzinga Bandi Kia Ngola, reine des royaumes de Ndongo et Matamba, correspondant à l'actuel Angola.
A travers une forme légère, accessible et mâtinée de régulières saillies comiques, Ingrid Agbo perpétue la mémoire d'épopées fondatrices injustement oubliées, rappelant ainsi l'inestimable valeur de cet héritage comme l'impérieuse nécessité de le conserver avec soin.
La série L'Arbre à Palimpseste sonne de sorte comme une réaction sans appel face à une méconnaissance générale de l'histoire du continent, de même qu'aux a prioris têtus afférents, et une vibrante invitation lancée à tout un chacun à s'intéresser à ces "autres" histoires - pouvant faire écho aussi à la brillante conférence de la nigériane Chimamanda Ngozi Adichie sur le danger d'une histoire unique - Ted Talk, 2009.
Ce travail panafricain imputable tout autant à des collaborateurs nigérians et burkinabés que malgaches répond également au besoin urgent de proposer aux jeunes africaines et aux jeunes africains des modèles d'identification ayant la même couleur de peau qu'eux !
Palimpseste, pour finir, le mot est bien choisi, puisqu'il évoque éloquemment une multiplicité vertigineuses d'histoires qu'on efface successivement pour en écrire une nouvelle, et qu'il s'agit à présent d'exhumer et de remettre au grand jour.
ZOOM
L'Afrique célébrée à Annecy en 2020
Le Festival d'Annecy, où la série L'Arbre à Palimpseste d'Ingrid Agbo fut présentée cette année, a décidé de mettre tout particulièrement à l'honneur les pays africains l'an prochain.
Ainsi que le décrète le délégué artistique du festival Marcel Jean : "C'est la production de tout un continent que nous souhaitons contribuer à faire connaître, entre les œuvres de quelques pionniers et les productions contemporaines de jeunes cinéastes, entre le Maghreb et l'Afrique du Sud, entre le Sénégal et l'Egypte."
Comme le dit pareillement le directeur de la CITIA (Cité de l'Image en mouvement d'Annecy), Mickaël Marin, il s'agira d' "offrir une meilleure visibilité à ces pays afin de promouvoir leur formidable créativité".
Une série de rencontres et de présentations de projets est d'ores-et-déjà prévue, notamment.
Matthias Turcaud