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La Caméra de bois d'Olivier Delahaye

Editions Grandvaux

Un roman délicat, passionné et instructif, évoquant la fin de l’apartheid.

J’avais laissé Olivier Delahaye sur les rives du Bosphore avec le souvenir de Pierre Loti.

Un écrivain du voyage avec lequel il s’était identifié, un homme à plusieurs vies qui n’a cessé de se réinventer avec la souplesse des chats que l’on croise à Istanbul, et la gaîté de ceux qui ne se lassent pas de rencontrer de nouveaux visages, les « autres » comme l’on dit dans les cercles bien intentionnés.

L’année suivante, c’est en Afrique du Sud que je retrouve Olivier Delahaye pour un autre voyage dans le temps.

Un temps à rebours, une époque moins reculée cette fois-ci, pour une autre géographie, puisqu’il nous ramène à l’époque de La Caméra de bois, un roman évoquant la fin de l’apartheid.

D’un livre à l’autre, cet auteur ne cesse de nous surprendre, passant des vestiges de l’ancienne Turquie aux blessures du contemporain dans un style alerte, loin des poncifs et des idées reçues. Des pages où il met en scène un groupe de jeune gens, des gamins issus d’un township un peu voyous, un peu dingues et amoureux qui se mettent à rêver de cinéma lorsque l’un d’entre eux tombe sur un caméscope…

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La Caméra de bois est la novélisation d’un film tourné en Afrique du Sud et récompensé par de nombreux prix, dont le prestigieux Ours de cristal à la Berlinale, Berlin, 2004.

L’appareil n’est pas abandonné, mais recueilli sur le corps d’un truand liquidé dans un règlement de comptes sur le bord d’une voie ferrée. A côté de cet objet de vie, son copain Sipho ramasse quant à lui un flingue avec une seule balle dans le barillet, objet de mort.

Cette double rencontre nous plonge dans un suspense où la vie de cette bande prend une direction nouvelle, lutte de pouvoir et vocation pour Madiba-le-silencieux : celle de transformer sa vie par l’œil de la caméra.

Un cinéma – mot qu’il ne connaît pas encore – qui devient alors la métaphore d’une existence bouleversée pour ces enfants perdus d’une transition politique où le poids des clichés et de la couleur de peau pèse lourd.

Ce roman a d'abord été un film, tourné en 2003, et primé à Berlin en 2004, dans lequel Jean-Pierre Cassel tenait un rôle mineur, celui d'un musicien français égaré en Afrique du Sud au temps de l'apartheid et donnant des cours de musique dans les townships.

Olivier-delahayeOlivier Delahaye, séduit par la présence et la personnalité lumineuses de Jean-Pierre Cassel, a décidé de faire de son personnage le narrateur du roman.

Il suit les tribulations de Madiba, l'adolescent à la caméra, dans une sorte de "400 coups" à l'autre bout du continent, dans les banlieues de Cape Town.

Et puis nous trouvons une adolescente, Estelle, la fille des Blancs qui refuse les barrières du monde d’avant, celles de cet apartheid inique et dangereux. Une violation, un sacrilège presque, puisque elle tombe amoureuse du cinéaste noir en devenir.

Je vois dans ce livre une ode à la volonté, au cinéma et à l’amour.

« Cette histoire pourrait se passer n’importe où » confie Olivier Delahaye avec l’idée que le destin de ces enfants dans un cadre bien précis puisse résonner ailleurs.

Malgré la tragédie, La Caméra de bois reste une ode discrète et joyeuse à cet esprit de transition par le regard d’enfants vierges de toutes méchancetés. Olivier Delahaye appartient à ces écrivains au long cours qui décident d’avoir la vie devant eux, toujours. 

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Hommage à Nelson Mandela

L'auteur de La Caméra de bois Olivier Delahaye confie :

« En sortant le livre aujourd’hui, je veux que les gens puissent réfléchir sur notre époque.

J’ai vécu la sortie de l’apartheid. Ce pays aurait dû finir dans un bain de sang.

Seule l’habileté et la diplomatie de Nelson Mandela ont réussi à contraindre le pays à négocier. »

Un miracle !

Sébastien de Courtois