Equipé depuis quelques mois d’un nouveau répertoire - savant mélange de highlife, d’afrobeat, de salsa, de musique tropicale et des classiques revisités à la sauce créole - le Bal de l'Afrique enchantée propose la même recette depuis de nombreuses années. Joie, amour et sueur, sans oublier, une bonne dose de géopolitique africaine.
Interview avec Vladimir Cagnolari, l’un des fameux mercenaires de l’ambiance. La leçon du tonton ? Timidité ou pas. L’essentiel est de s’éclater.
Joie, amour et sueur est votre sainte trinité. Un crédo également. Peut-être même un mode de vie ? Et, si vous étiez monothéiste, quelle serait votre unique divinité ?
Vladimir Cagnolari : C’est en effet notre devise parce que ça résume assez bien l'énergie qu’on a envie de donner à ces bals. C’est résolument dans un esprit festif, de partage, que l’on a pensé le bal.
Il y a des familles, des enfants, des jeunes et des moins jeunes, qui viennent nous voir. C'est pour le côté joie, amour et sueur que l’on a eu envie de tout cela. En résumé, on aime danser !
Quand on a lancé le Bal, il y a cinq ou six ans on n'était pas certains de savoir comment ça allait marcher. Ceux qui viennent d'Afrique, nos différents publics, les gens ne pensent pas toujours savoir comment danser. Mais quand tu arrives à oublier ta timidité, tu t’éclates. Ça marche aussi comme ça !
Après, nous on est plutôt résolument polythéiste mais s'il devait y avoir qu'un seul Dieu ce serait l'Amour, car la sueur est comprise dedans ! (rires)
Cela fait maintenant à peu près un an que le répertoire du Bal de l’Afrique enchantée a changé ? Pourquoi ?
Vladimir Cagnolari : Oui. Quand on a changé de répertoire, c’était pour raconter une autre histoire. On voulait se renouveler. On voulait aussi brasser différents endroits, différentes régions d’Afrique. On a aussi choisi les chansons en fonction de ce que ça nous permettait de raconter.
Par exemple, quand on parle de Thomas Mapfumo, un chanteur zimbabwéen, on ne parle finalement pas de la chanson ni des paroles. On parle du rythme et de ce que ce morceau a impliqué sur l'indépendance du pays. Là, on s’attache plus à l'aspect historique, culturel.
De la même manière on parle aussi de l'Angola et de la lutte de territoire dans cette aire de l’Afrique. Avant, on parlait beaucoup de francophonie. Et, il faudrait peut-être qu'on l’évoque de nouveau un peu plus.
Tous les deux, trois mois on renouvelle petit bout par petit bout les morceaux. Notre répertoire évolue beaucoup.
Vous avez pour habitude de lier avec sagesse musique et géopolitique. Comment cette cuisine se compose sur scène ?
Vladimir Cagnolari : C'est un peu le principe du Bal de l'Afrique enchantée. Même si on parle aussi de société, du rapport homme femme, on ne fait pas que du très lourd ! La forme scénique nous va bien. On aime ce côté légèreté dans ce qu’on fait. On aime le live. Etre avec les gens de manière plus directe qu'à la radio.
Après on pourrait voir cela sous d’autres formes. Parler de l’Afrique, sa culture et son histoire et parler sous la forme d’un projet vidéo, par exemple.
Vous explorez actuellement d’autres formes ? Quels sont vos projets à venir ?
Vladimir Cagnolari : Je donne un cours actuellement. Il traite de musique, de société et de politique en Afrique. Je le donne à Sciences Po. C'est une expérience intéressante. C'est un cours atypique. Ça nous amène sur un autre terrain. Il m’amène à poser la question du matériau non-académique dont la musique fait partie. Je refais également des reportages sur RFI.
Solo, lui, est toujours bien pris par l'Afrique en Solo sur France Inter. Il a également un autre projet sur la danse. Hortense (Ndlr : La nièce de l’Afrique enchantée. Hortense Volle), elle va bientôt reprendre ses activités à RFI.
Il y a des milliards d'idées qui vont naître. Mais pour l'instant on est déjà pas mal occupés les uns comme les autres. Et tant que le Bal de l'Afrique enchantée continue, c'est super !
ZOOM
Le portrait chinois de Vladimir Cagnolari
Si vous étiez un(e) auteur(e) africain(e) ou un livre. Qui seriez-vous ?
Vladimir Cagnolari : Allah n'est pas obligé d’Ahmadou Kourouma.
Si vous étiez un(e) réalisateur(trice) africain(e) ou un film. Qui seriez-vous ?
Vladimir Cagnolari : Sembène Ousmane pour l'ensemble de son œuvre.
Si vous étiez un(e) musicien(ne) / chanteur/teuse africain(e). Qui seriez-vous ?
Vladimir Cagnolari : Je serais Franco Luambo du Congo et Miriam Makeba.
Si vous étiez un album. Qui seriez-vous ?
Vladimir Cagnolari : L'épopée de Soundiata Keïta par le Rail Band du Mali.
Si vous étiez un plat africain. Lequel seriez-vous ?
Vladimir Cagnolari : Une bouillie de maïs. Cela s’appelle l’amiwo au Bénin ou akoumé au Togo. L'autre plat que j’aime beaucoup, est le koki qu'on mange au Cameroun. C'est une pâte faite avec des petits haricots blancs.
Si vous étiez une ville africaine. Laquelle seriez-vous ?
Vladimir Cagnolari : Je serais Kinshasa. C'est une ville où il y a un bouillonnement créatif hallucinant. Les inventeurs sont partout. Y a une énergie qui circule dans cette ville, c'est fou. Ca fait partie de ces villes qui me réveillent.
Propos recueillis par Eva Dréano