Lamyne M. : " C’était important de faire cette exposition dans la Basilique en tant que musulman noir et africain ".
Prolongation jusqu’au 10 juin 2016 – Basilique cathédrale de Saint-Denis – 93200 Saint-Denis.
Interview du styliste et artiste Lamyne M.
L’artiste Lamyne Mohamed né au Cameroun n’est pas seulement un autodidacte.
Il est aussi un artiste soucieux de partager sa passion et son travail avec les autres.
En effet, il a construit son exposition de Gisants, robes et plis à la Basilique de Saint-Denis avec la collaboration des élèves du diplôme de technicien des métiers du spectacle (DTMS) du lycée professionnel La Source à Nogent-sur-Marne, ainsi que des femmes de la maison du quartier Floréal de Saint-Denis.
A travers cette exposition, c’est tout un monde qui se révèle. Au-delà du lieu qui est magnifiquement improbable, l’histoire de ces femmes autrefois adulées revit.
Ainsi, d’Isabelle d’Aragon à Marguerite de France, les gisants et les robes de ces reines et princesses d’un temps sont travaillées avec minutie par Lamine M. qui s’emploie à marier les tendances du jour.
Rencontre et interview à la Basilique cathédrale de Saint-Denis.
Comment êtes-vous arrivé dans le monde de la couture ?
Lamyne M. : Je me suis intéressé à différencier des petits bouts de vêtements que j’avais. A partir de ce moment-là, j’ai commencé à créer et à penser des petites pièces. J’ai tout appris sur le tas, je n’ai pas été dans une école spéciale.
Vous vivez aujourd’hui à Saint-Denis. Avez-vous choisi cette ville, ou c’est cette ville qui vous a choisi et que représente cette ville pour vous ?
Lamyne M. : Je pense que ce sont les deux. La ville de Saint-Denis représente quelque chose de très important pour moi parce que je pense qu’il faut s’approprier l’endroit où on vit et où on paie ses impôts. En somme, l’endroit vous choisit et vous choisissez aussi l’endroit.
Comment vous est venue cette envie de donner vie aux gisants de reines et de princesses dans cette magnifique Basilique ?
Lamyne M. : J’avais des questionnements qui méritaient des réponses d’une part. Et d’autre part, c’est aussi pour dire qu’il y a des musulmans dont je fais partie ouverts aux choses, à la création, sans limite par rapport au lieu. Ils n’ont pas d’opinions fermées sur des questions politiques, religieuses ou autres.
En quoi ces choix de tissus aux diverses inspirations étaient une évidence pour vous ? Pourquoi avez-vous choisi des tissus africains par exemple ?
Lamyne M. : J’ai choisi des tissus africains parce que c’est là d’où je viens, c’est la base de l’Histoire, et j’aurais aimé défendre ma culture, donc le but est de présenter l’importance des personnes originaires de ces continents. Il se trouve que certaines de ces personnes gravitent autour de cette Basilique, en y pénétrant parfois ou en restant à l’extérieur.
En tant que musulman, cela ne m’a pas empêché de travailler dans une Basilique. Il y a un gros message derrière qui est de dire que nous Africains n’avons pas de penchant pour une religion précise. Nous sommes d’abord tout à fait animistes avant d’être ce qu’on est aujourd’hui. Les Africains ont adopté toutes les religions mais à la base ils sont animistes.
Nous avons nos cultures, et ne devons pas prendre parti quand d’autres se battent pour des religions. Il y a vingt ou trente ans, il n’y avait pas de conflits religieux en Afrique, aujourd’hui nous les avons et c’est dommage car nous avons des frères qui s’engagent dans des choses qui n’entrent pas dans nos valeurs et principes.
Enfin, pour moi c’était important de faire cette action dans la Basilique en tant que musulman noir et africain.
En parlant de l’Afrique avez-vous des projets à venir ou en cours sur ce contient ?
Lamyne M. : Absolument, c’est la base !
Quel que soit les formes de mon avenir ici, je pense toujours à de futurs projets en Afrique. L’Afrique reste pour moi le début et la fin.
Il s’agirait de projets artistiques et autres. Sur le continent africain je n’ai pas de limite. Je ne pense pas forcément à mon pays, le Cameroun, je peux m’établir ou m’installer dans n’importe quel pays africain, ça m’est égal.
Bande-annonce de l'exposition "Grandes robes royales"
ZOOM
Un hommage aux femmes
Vous avez mis en valeur les femmes au cours de votre travail, avez-vous un message pour toutes les femmes du monde par exemple ?
Lamyne M. : Je leur conseillerais de tenir bon. Nous allons arriver à une égalité exacte, au respect et à leur redonner leur place, celle qu’elles méritent et qu’elles ont toujours eue.
Une place qui a peut-être été bafouée et négligée par certains.
Diane N.