St Germain, un nouvel album aux sonorités africaines
Après près de 15 ans d’absence, St Germain, de son vrai nom Ludovic Navarre, revient avec un nouvel album éponyme d’inspiration malienne basé sur des percus et des sonorités jazzy.
A l’origine de deux albums à succès mondial, Boulevard (1995) et Tourist (2001), Ludovic Navarre ne fait pas les choses à la va-vite ni pour répondre à une attente.
Se renouveler. Ne pas tomber dans la routine jazz-house. Prendre son temps. Aller puiser du côté de l’Afrique du Sud, du Ghana, puis du Mali. Rencontrer des artistes traditionnels maliens à Paris.
Voilà en quelques mots, comment s’est construit le nouvel album de St Germain.
Interview avec l’artiste Ludovic Navarre, fleuron de la deep-house française, sur sa musique bluesy et revigorante. Attention à l’électrochoc !
Qu’a la musique africaine de particulier selon vous ? Pourquoi suscite-t-elle en vous autant d’intérêt depuis quelques années ?
Ludovic Navarre : En fait, c’est surtout lorsque je suis tombé sur une vidéo youtube de musiciens-chasseurs donso du Mali que j’ai ressenti un déclic. J’ai eu envie de mélanger le style malien avec ma musique.
Je ne suis pas un expert mais je connais un peu la musique africaine. J’avais été du côté de l’afrobeat, puis du highlife. J’avais écouté des musiques touaregs. Je cherchais à mélanger des sonorités que je n’avais encore jamais mélangées. J’ai été captivé par les ngonis et Kamelé ngoni (Ndlr : Instruments à cordes pincées d’Afrique de l’Ouest). Je les ai tout de suite adorés.
D’autres rythmes africains vous ont influencé ? Quels sont-ils ?
Ludovic Navarre : L’afrobeat avait déjà été travaillé par d’autres artistes. Je ne voulais pas reproduire ce mélange avec l’afrobeat. Je suis donc parti au départ sur le highlife. En France, j’ai eu du mal à trouver des musiciens de highlife. On en trouve plus dans les pays anglophones.
J’ai ensuite rencontré des musiciens du monde du jazz. Je cherchais quelque chose qui sonne un peu mélancolique. La musique malienne est parfois bluesy, parfois criarde. Ces chants de griot, de chasseurs maliens, qui parlent et qui tout d’un coup se mettent à crier, comme dans le blues américain, ça provoque des électrochocs. J’aimais ça !
La construction de votre dernier album a duré six ans. En solitaire, vous avez réalisé des boucles. Puis, chacun des artistes et chanteurs ont enregistré séparément. Comment mélange-t-on de la house à des sonorités africaines ?
Ludovic Navarre : Les boucles musicales avaient été faites en amont. Pour faire jouer tout le monde en même temps, c’était un peu tôt. Les artistes les ont donc jouées chacun de leur côté en se basant sur ces mélodies que je leur avais données. J’ai donc remonté ce qu’ils avaient joué en gardant des bouts de chant, des jeux de guitare, de ngoni ou de percussion.
Et, sur scène, que donne ce mélange de sonorités ?
Ludovic Navarre : Sur scène, pendant la tournée, les artistes reproduisent ce qu’ils ont enregistré en studio tout en jouissant d’une certaine liberté. Cela fait déjà un mois et demi que nous avons entamé la tournée.
Comme les artistes avec qui je suis sur scène, (Ndlr : Guimba Kouyaté, Fanta Bagayogo, Nathawa Doumbia, Jorge Bezerra,…), sont des gens qui aiment et qui savent jouer, c’était facile de surprendre le public et de nous surprendre nous-même par la même occasion. Je me souviens sincèrement du premier jour de concert. On s’est tous regardé à un moment en se disant : « Ça va le faire ! ».
Les sonorités changent beaucoup des « basse-batterie-piano » d’une formation jazz classique. Il y a des rythmes 6/8 (Ndlr : un rythme ternaire très utilisé en Afrique) et un type de jeu particulier. C’est également très joli à regarder, cette façon qu’a le guitariste (Ndlr : Guimba Kouyaté) de jouer. On prend plaisir à les regarder tous. Sourire, danser.
Et après, quelle est la suite du programme ?
Ludovic Navarre : Au mois de mars 2016, on part en Australie et en Nouvelle-Zélande. Au mois d’avril, aux Etats-Unis. Puis on continuera avec une quinzaine de festivals en Europe.
Quel est le retour du public sur vos premières sessions live ?
Ludovic Navarre : J’ai l’impression que tout le monde est ravi. Cet album est très différent de mes précédents. J’ai pourtant l’impression que les gens prennent bien la chose. Que le message passe très bien.
St Germain - Real Blues
ZOOM
Le portrait chinois de Ludovic Navarre
Si vous étiez un(e) auteur(e) africain(e). Qui seriez-vous ?
Ludovic Navarre : Je n’en ai aucune idée !
Si vous étiez un(e) réalisateur(trice) africain(e). Qui seriez-vous ?
Ludovic Navarre : Le réalisateur de Timbuktu, Abderrahmane Sissako. J’ai été surpris par son film. J’ai trouvé l’approche du djihadisme très sensible et le film drôle.
Si vous étiez un(e) musicien(ne) / chanteur/teuse africain(e). Qui seriez-vous ?
Ludovic Navarre : Il y a plusieurs groupes et artistes qui me plaisent particulièrement. J’aime Zani Diabaté du Super Djata band, Coumba Sidibé, une chanteuse malienne, City boys band du Ghana et African Brothers band.
Si vous étiez un plat africain. Lequel seriez-vous ?
Ludovic Navarre : Le mafé bien sûr !
Si vous étiez une ville africaine. Laquelle seriez-vous ?
Ludovic Navarre : Je serais Bamako.
Propos recueillis par Eva Dréano