Electric Togoland, le Togo électrifié et revisité
Si le guitariste et chanteur Amen Viana devait vouer un culte quelconque, sa sainte trinité se nommerait Jimi, Bob et Fela.
Sur l’album choral Electric Togoland, orchestré par Amen Viana et Laurent Ciron, une quinzaine de chanteurs, musiciens et personnalités togolais revisitent des classiques de leur culture.
Au cours des dernières années, on l’a vu aux côtés d’artistes tels que Miriam Makeba, Gasandji, Raul Midon, Keziah Jones, The Black Eyed Peas, Abd al Malik.
Amen Viana revient aujourd’hui sur le devant de la scène avec son nouveau projet, Electric Togoland. Un album dans lequel il revisite des classiques togolais, nous donne à entendre ses multiples influences électrifiées et de nombreux artistes togolais méritant d’être découverts ou ré-écoutés.
Interview avec un artiste éclectique et passionné.
Electric Togoland est un projet qui revisite des classiques togolais dans un genre rock, funk, groove. De quoi est-il fait ?
Amen Viana : Cet album est très éclectique. J’y ai mis tout ce que j’aime en musique. J’ai joué avec beaucoup d’artistes dans des styles différents. Mon projet est multi styles.
Au départ, Electric Togoland raconte ma passion de musicien togolais. J’ai fait le tour du monde et je suis revenu au Togo pour mettre mon expérience au service de la musique. Pour redonner un nouveau souffle à la musique de mon pays.
Que représente ce projet pour vous ? Qu’a Electric Togoland de différent de vos précédents albums ?
Amen Viana : Mon premier album, je l’ai enregistré avec mon premier trio que j’avais à Lomé avant de partir en France. C’était une période où j’étais musicien de cabaret. Pour le deuxième, j’étais déjà parti du Togo. Dans cet album, je voulais montrer une dimension plus personnelle, plus intimiste de ma musique. C’est un album très acoustique.
J’ai ensuite fait un album avec un groupe de musiciens français, Zoka fonction. C’était un album très rock. Je suis alors revenu à mes premiers amours.
Electric Togoland est un condensé de tous ces projets, de toutes mes influences. J’ai essayé d’être fédérateur sur ce projet enregistré entre la France et le Togo.
Je suis parti avec une équipe de caméraman et un régisseur son, Laurent Ciron. Je voulais enregistrer les chanteurs chez eux. Là où ils étaient le plus à l’aise. J’étais au service de tous les chanteurs que j’avais invité sur cet album.
J’avais une idée de qui je voulais rencontrer. J’ai aussi laissé une part au hasard ; je suis arrivé en n’ayant pas tout planifié. Je me suis nourri de tout ce qui pouvait m’être proposé. Cela explique probablement les styles variés qu’on peut y trouver. Le travail de post-production a été fait ici, à Paris, avec mon ami Laurent Ciron.
Pourquoi joues-tu de la musique ? Et pourquoi Jimi Hendrix, Bob Marley et Fela Kuti ?
Amen Viana : J’ai grandi dans une famille où la musique faisait partie de notre quotidien. J’avais aussi des grands frères fans de musique.
Quand j’ai vu Jimi Hendrix pour la première fois à la télévision, j’ai été comme percuté par cet ovni. J’avais neuf ans. C’est lui qui m’a poussé à jouer de la guitare.
Pour moi, ces trois artistes ont un message porté vers l’Afrique. Et Lorsque j’écoute Hendrix, j’entends de la musique africaine. J’entends des percussions dans sa façon de jouer la musique. Fela me parlait pour son discours panafricaniste. Et, le message universel de Bob Marley, la philosophie qui accompagne le reggae, également ne laisse personne indifférent.
Ma musique est un condensé de cela et je suis peut-être un mix entre Fela, Jimi et Bob. (rires)
Par les temps obscurs que nous vivons actuellement quels rôles la musique et l’artiste peuvent-ils jouer dans la société ?
Amen Viana : J’ai toujours pensé que la musique pouvait guérir les gens. La musique peut atténuer les douleurs et les artistes ont ce rôle-là de pouvoir interpeler les gens.
Dans ces temps difficiles, les positions radicales, la haine, la suspicion sont de mise. Dans un concert il n’y a plus de religion, plus de couleur… La musique peut rassembler, peut fédérer.
Electric Togoland Teaser
ZOOM
Le portrait chinois de Amen Viana
Si vous étiez un(e) auteur(e) africain(e). Qui seriez-vous ?
Amen Viana : Chinua Achebe. Il a écrit Le monde s’effondre. (Ndlr : À travers le destin d'Okonkwo, un notable de son clan, Chinua Achebe évoque le choc culturel qu'a représenté pour les autochtones l'arrivée des Britanniques à Igbos, à la fin du XIXe siècle et la colonisation du Nigéria par les Britanniques.)
Si vous étiez un(e) réalisateur(trice) africain(e). Qui seriez-vous ?
Amen Viana : Un réalisateur africain, ça ne me vient pas. Mais autrement, j’aime bien les films de Tarantino.
Si vous étiez un(e) musicien(ne) / chanteur/teuse africain(e). Qui seriez-vous ?
Amen Viana : Keziah Jones ! Pour la chanteuse, je vais aller chercher chez moi, au Togo. Bella Bellow.
Si vous étiez un album de musique. Lequel seriez-vous ?
Amen Viana : Je serais les albums Exodus de Bob Marley et Axis : Bold as Love de Jimi Hendrix.
Si vous étiez un plat africain. Lequel seriez-vous ?
Amen Viana : Un mafé bien épicé.
Si vous étiez une ville africaine. Laquelle seriez-vous ?
Amen Viana : Lomé. C’est une petite ville. On en a rapidement fait le tour mais on n’en est jamais lassé. J’ai beaucoup voyagé mais je ne me sens jamais aussi bien qu’à Lomé.
Propos recueillis par Eva Dréano