Mariana Ramos, la simplicité du Cap-Vert
Une visite sans prétention aux côtés de la chanteuse cap-verdienne Mariana Ramos. Comment ne pas s’y sentir bien ?
Son nouvel album, entièrement enregistré au Cap-Vert avec des artistes de l’archipel est composé de treize morceaux gorgés d’énergie, de sensualité, de gaité et de vague à l’âme. Son nom ? Quinta.
Comme son chiffre porte-bonheur, son cinquième album, son jour de naissance, également celui de l’indépendance du Cap-Vert. Une visite sans prétention aux côtés de Mariana Ramos. Comment ne pas bien s’y sentir ?
Avant de la retrouver au New Morning le 27 novembre prochain pour un concert dédié à la sortie de son nouvel album, Mariana Ramos a accepté de répondre à nos questions en toute simplicité.
Quinta, le 5ème album de Mariana Ramos, est une balade en musique aux confins de ces îles magnifiques du Cap-Vert.
Votre cinquième et nouvel album, Quinta est votre premier enregistré entièrement au Cap-Vert. Quel sens tout cela prend pour vous ?
Mariana Ramos : Ça faisait un moment que je voulais faire un album plus traditionnel. J’ai décidé que ce serait le cinquième. Cinq est mon chiffre porte-bonheur. Je suis née le 5 juillet. C’est aussi la date de l’indépendance du Cap-Vert.
Je voulais aussi prendre le temps de bien faire les choses. Je souhaitais qu’il soit authentique et j’ai choisi des auteurs-compositeurs capverdiens. A Praia, J’ai d’abord découvert Jorge Tavarès, auteur inconnu du grand public. Il m’a fait écouter une dizaine de ses chansons. Elles étaient toutes magnifiques. J’ai choisi cinq titres, tous inédits et de rythmes différents. Ensuite je suis allée dans la ville de Mindelo. J’y ai rencontré d’autres auteurs compositeurs.
Pour la première fois j’ai enregistré au pays, ainsi j’étais dans l’ambiance de la vie quotidienne … Ce qui m’a permis de me rapprocher davantage de mes racines. De retour en France, j’ai dû choisir treize titres sur trente belles propositions. Les musiciens, anciens compagnons de Césaria, ont sublimé cet album, en particulier Rufino Almeida, alias Bau (guitare), Domingos Fernandes dit Totinho (saxo, reco-reco), et surtout Toy Vieira (guitare, cavaquinho, piano, bongos…) à la direction musicale. Aussi Teofilo Chantre, auteur d’une ode à la créolité féminine, Toy Vieira en invité exceptionnel.
Il existe de nombreux styles musicaux propres au Cap-Vert et que vous interprétez dans cet album. Quel rôle jouent-ils dans la société cap-verdienne ?
Mariana Ramos : Le batuque est un rythme et une danse de Santiago interprété par les femmes en opposition au pouvoir en place. Le cola San Jon (fête de la Saint Jean) a tempo soutenu par les tambours (Ndlr : Cola, Kola, Cola-boi, Sla séparation de la terre et les êtres chers. C’est à la fois poignant et d’une danjon, Sanjom, autant d'appellations et de variétés pour un genre musical profondément enraciné dans les îles, puisqu'il s'agit probablement du tout premier style chanté et dansé au Cap-Vert, bien avant le batuque, dont il serait l'ancêtre.)
Dans la coladera, on parle de la vie quotidienne, de la société, de choses graves, d’une façon assez légère. La morna est l’identité musicale et l’âme de l’archipel.
A travers la morna, on parle de la sodade, douce mélancolie. On évoque souvent la mer qui éloigne le bien aimé de sa famille. Parfois, les hommes partent et refont leur vie ailleurs, les femmes doivent, avec courage, se débrouiller seules avec les enfants.
Aussi le carnaval de Mindelo, l’un des plus beaux événements culturels de São Vicente. J’y ai participé ces trois dernières années et j’ai repris dans Quinta une samba, « Estrela da marinha » composée par l’un des plus grands auteurs du Cap-Vert B.Leza. (Xavier Da Cruz, 1905-1958)
Sur la couverture de votre nouvel album, on vous voit coiffée de bigoudis dans le salon d’un barbier qu’on suppose capverdien. Cette image sans artifice vous montre sous un jour populaire, intimiste, proche des gens. Cela représente-t-il l’esprit de votre nouvel album ?
Mariana Ramos : Oui. J’ai trouvé que cette photo était tellement le reflet de l’album. Tout y est traditionnel et ça représente le Cap-Vert. Dans mes précédents albums mon portrait était mis en avant. J’avais envie d’autre chose. Je trouvais cette photo tellement spontanée. Elle est naturelle, dans l’instant.
Chez ce barbier, ce jour là, je passais. Je faisais un coucou aux musiciens. J’avais mes bigoudis sur la tête. Ils se sont dit, tiens une chanteuse. Ils m’invitent donc à chanter. C’est tellement le Cap-Vert ! La photo était vraiment improvisée. Elle a été prise par un ami. Un très bon photographe.
Nada e Perfeito - Nouvel album QUINTA de Mariana Ramos
ZOOM
Le portrait chinois de Mariana Ramos
Si vous étiez un(e) auteur(e) africain(e). Qui seriez-vous ?
Mariana : Je dirais Eugène Tavarès, un écrivain, poète cap-verdien.
Si vous étiez un(e) réalisateur(trice) africain(e). Qui seriez-vous ?
Mariana : Il y a un réalisateur que j’aime bien. Son nom est Moussa Séné Absa (Ndlr : L’extraordinaire destin de Madame Brouette, Teranga blues…).
Si vous étiez un(e) personnalité politique africain(e). Qui seriez-vous ?
Mariana : Nzinga Mbandi, la Jeanne d’Arc d’Angola.
Si vous étiez un(e) musicien(ne) / chanteur/teuse africain(e). Qui seriez-vous ?
Mariana : Miriam Makeba et Angélique Kidjo.
Si vous étiez un album de musique. Lequel seriez-vous ?
Mariana : Keys of life de Stevie Wonder.
Si vous étiez un plat africain. Lequel seriez-vous ?
Mariana : Le thiéboudiène.
Si vous étiez une ville africaine. Laquelle seriez-vous ?
Mariana : Je serais Mindelo.
Propos recueillis par Eva Dréano