Il y a Vikram, le fils aîné d'une famille indienne installée à Nakuru, capitale de la province de la Vallée du Rift, au Kenya (à un peu plus d'une centaine de kilomètres de Nairobi). Sa soeur, Deepa; son ami Njoroge, une jeune Kikuyu dont le grand-père qui l'élève vit à deux pas.
Et puis il y a Bill et Annie, deux Blancs qui viennent jouer quand leur mère passe faire quelques courses. On joue aux cow-boys, on fait vivre les mythes Hindous, et, comme on est au début des années 1950 on joue aux Mau Mau. Mais pas pour longtemps. C'est interdit : ça fait peur aux adultes.
La décolonisation en marche décidera de vie et de la mort de ces quatre personnages. Ce seront des vies un peu hors norme, prises dans l'étau des traditions, des clichés raciaux, des vies brûlantes de fous désirs de changement, d'histoires d'amour, d'alliances politiques, et de scandales de corruption.
The In-Between World of Vikram Lall (courroné du Prix Giller en 2003) est un véritable thriller politique qui se joue au coeur de la naissance d'un Kenya indépendant raconté par un homme, Vikram, qui ne se remettra jamais d'une enfance blessée, et pour qui le monde se déroulera comme une série de questions restées sans réponse.
Tantôt Vikram apparaîtra comme un personnage attachant, tantôt il soulèvera des hauts le coeur d'indignation... C'est toute la force de ce personnage, mais aussi de son auteur M.G. Vassanji (dont la carrière d'écrivain est toute aussi parsemée de prix littéraires http://www.mgvassanji.com/) qui porte un formidable et captivant roman, dont le ténébreux suspense ne faiblit jamais. A lire absolument !
ZOOM
Le Goldemberg scandal, une affaire de corruption made in Kenya
Sans doute Vikram Lall s'est-il inspiré de l'énigmatique Kamlesh Pattni, qui, à tout juste 25 ans, fut au coeur de la plus grosse affaire de corruption que le Kenya ait jamais connu.
Fils d'un joailler de Mombasa, Pattni était un parfait inconnu quand il ouvrit sa petite boutique de bijoux à Nairobi. De la petite boutique naîtra une énorme machine politico-économique d'exportations fictives d'or, de diamants et de pierres semi-précieuses alors que le Kenya n'a que très peu (voire pas) de réserves, en échange d'énormes sommes d'argent qui ont coûté plus de 500 millions d'euros aux contribuables kenyans.
Le scandale, qui éclata en 1992, se traina au fil de longues années de procès resté sans véritable conclusions.
L.S.