Une enfance de Jésus de J.M. Coetzee
Seuil
Mystérieuse parabole au titre trompeur.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que John Maxwell Coetzee, probablement le plus grand romancier africain vivant, a voulu créer la surprise avec son nouveau roman.
Par le titre d’abord : loin d’être une hagiographie s’attardant sur les premières années du prophète, Une enfance de Jésus se situe dans un contexte contemporain. Dès les premières pages, Coetzee nous plonge dans un dédale administratif aux accents kafkaïens, une habitude chez lui qui symbolise la perte d’humanité dans la « Babylone » moderne.
Par le contexte ensuite : jamais dans ce roman, on ne peut se rattacher à un lieu connu et mettre sur les endroits où se trouvent les personnages un nom de ville ou de pays existants.
Plusieurs niveaux
Si ça ressemble à un pays latino-américain, à commencer par Belstar, la ville d’où débarquent sans plus d’explication le jeune David et Simon, son protecteur, on est très loin de pouvoir situer l’action de manière précise.
On sait seulement qu’ils ont traversé le désert pour arriver dans un centre d’accueil. Proche de la fable par ce que ce roman a d’allégorique, Une enfance de Jésus se lit sur plusieurs niveaux. On perçoit bien que chaque action a une forte valeur symbolique tout en ayant du mal à toujours rattacher les symboles en question.
Surprenant, ce nouveau roman de Coetzee a bien quelque chose de ces chefs d’œuvre : assez froid, mais révélant une minutieuse intelligence. Cependant, le propos est plus confus, moins saisissant qu’à l’accoutumé.
ZOOM
L’interview donnée par Coetzee au Nouvel Observateur
On connaît très peu sa vie, même si ses correspondances avec Paul Auster, sorties récemment permettent de mieux saisir sa personnalité et sa vie quotidienne.
On voulait donc compléter cette chronique avec l’interview donnée au Nouvel Observateur en septembre 2013. Il apparaît à l’image de son dernier roman : froid et peu loquace. Mais intéressant malgré tout.
Romain Dostes