2ème album de Téta, le guitariste aux doigts de fée
Balafomanga production
Entre jazz et blues, rythmes ternaires du tsapiky et improvisations.
Le mastering léché du nouvel album de Téta, intitulé Fototse racines roots, nous transporte sans préambule en plein cœur de Madagascar.
Enregistré en studio et en extérieur, nous sommes accueillis dès la première bande son par le bruit des vagues, puis d’un véhicule motorisé ou de sable ! La guitare de Téta s’approche, doucement, puis repart aussitôt.
Dans le deuxième morceau de l'album, elle ré-apparait, suivant son propre rythme, entre accords paisibles et danses de doigts effrénées. La voix de Téta parfois redoublée par celle de Kira offre de courtes échappées polyphoniques.
Dans chacune de ces quinze pistes, Téta chante la tradition et les croyances de son pays. Il transmet la bonne parole. Argent, hommage à la terre nourricière, à la mer, vertus de l’éducation, amour, dénonciation des injustices et des inégalités sociales… Téta aborde de nombreux thèmes de la société malgache semblant être autant de petites morales à usage public.
Le slam de Mohamed Ali Ivesse alias Momo intervient dans « Ambarambao » tel l‘apparition d’un fantôme. Interrompant Téta, Momo scande son texte d’une voix profonde et impérieuse. Puis, disparition abrupte de Momo. Un phénomène, également notable dans chacun des morceaux et des accords de Téta. Cet imprévisible instrumentiste surprend par sa dextérité et sa capacité à maîtriser sa musique. On ne saurait prédire quand un morceau est sur le point de se terminer ou lorsqu’un nouveau rythme se prépare.
La durée de chacun des morceaux n’est ici d’aucune aide. Elle est trop variable. Alors, il ne nous reste plus qu’à nous laisser porter par le rythme diablement enivrant de ce quinze pistes. Et, à nous laisser ondoyer, au creux de ses vagues.
ZOOM
Un peu d’histoire
Il y grandit en s’exerçant d’abord à la mandoline pour lui préférer à l’âge de 8 ans la guitare. Enfant, il accompagne son père et deux de ses frères, dans les provinces voisines pour animer les bals poussières et les cérémonies traditionnelles de la région. Le tsapiky, style musical malgache, berce son enfance. Il apprend les rythmes ternaires, les coutumes et valeurs contées dans ces chansons.
Au début de son adolescence, il met fin à ses études pour s’adonner entièrement à la musique et aider sa famille. Son don de guitariste hors pair l’amène rapidement à jouer seul dans les cérémonies traditionnelles et les bals poussières.
Par la suite, il forme différents groupes et se lance en 2007, dans une carrière solo. En 2009, il enregistre son premier album Any Aminao Any. Deux ans plus tard, il est le gagnant du prix Musique de l’Océan indien.
L’année suivante, sort son album Fototse racines roots. Enregistré sur place, l’album 100% malgache, est fait d’une matière rare, des mains de l’homme aux doigts de fée.
Eva Dréano