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Jupiter & Okwess International
All Other / La Belle Kinoise Production
Direction planète Congo.
Patrie de la Rumba, du Soukous et du Ndombolo, la RDC s’est une nouvelle fois faite remarquer pour bonne conduite sonore. Le responsable, Jupiter Okwess International. L’objet du délit, l’album Hotel Univers.
S’il ne prétend pas pour autant être sorti de sa cuisse, Jupiter est son nom de scène. Jean-Pierre Bokondji, ce petit fils d’une guérisseuse célèbre de l’ethnie Ekonga, du groupe Mongo, situé dans la région de l’équateur, est également connu pour ne jamais ménager sa peine.
Inventeur du Bofenia rock, nageant systématiquement à contre-courant des modes musicales et de la bien-pensance générale, l’artiste au charisme divin et au physique élancé d’une liane congolaise, a la tête dure et les idées bien en place.
Après avoir passé son adolescence à Berlin avec son père - attaché de l’ambassadeur - la décennie 80 marque son retour en RDC. Jupiter y vit en jouant des percussions et en chantant dans des veillées funéraires ou des cérémonies de guérison. Dans le quartier Lemba, point névralgique d’où émergent Lokua Kanza et Ray Lema, avant-gardistes de toujours, il s’installe et s’attèle à recueillir les sonorités venant des quelques 450 ethnies co-existant en RDC.
En racontant les richesses de son peuple, il tord le cou aux idées réductrices visant à faire exclusivement de la RDC le pays des guerres fratricides et des président-despotes. En 1999, après avoir sillonné l’Afrique avec son orchestre Okwess, il est sélectionné pour représenter la RDC au Marché du spectacle des Arts africains à Abidjan (MASAA).
La guerre pousse les membres de son groupe à s’installer en Europe. Jupiter, « le Général rebelle », lui, n’est pas prêt à lever le camp. Inventer ce fameux style capable de représenter tous les congolais, est le combat qu’il continue de mener avec son nouveau groupe re-constitué sous le nom d’Okwess International.
Dans les années 2000, le Bofenia rock rassemble enfin ses premiers partisans. En 2011, Jupiter se distingue au côté de Damon Albarn dans Kinshasa One Two. Peu avant, il est la figure emblématique, ne manquant ni de souffle ni d’inspiration, du documentaire Jupiter’s dance dans lequel Staff Benda Bilili fait également une apparition remarquée.
Enfin, le rythme s’accélère. Jupiter & Okwess International a depuis quelques temps la cote auprès d’un public de congolais et d’occidentaux branchés de la capitale. Et en 2012, il conclut une tournée de deux mois en Europe avec la sortie de ce bijou musical co-produit par All Other (Amadou et Mariam) et La Belle Kinoise production : Hotel Univers.
ZOOM
Hotel Univers de Jupiter & Okwess International, inspirations multiples pour militantisme universel
Si l’on perçoit également dans l’album une sacrée tendance au rock tapageur et un groove furieusement assumé, on ne s’étonnera pas d’apprendre que jeune, Jupiter se plaisait à écouter James Brown et Deep Purple.
Percussions et guitares électriques marquent le rythme inspiré du soukous, tandis que la voix grave et théâtrale du chanteur appelle à plus de conscience et de résistance. Car le guerrier chanteur, qu’il parle de son expérience à Berlin dans The world is my land, de l’histoire de son pays dans le morceau Congo, ou d’amour avec Margarita, il appelle avant tout à un militantisme humain et sans frontière.
Eva Dréano