Proche du thriller par la tension qui s’en dégage, Hijacking sort du cadre conventionnel du film d’angoisse en s’embarrassant du moins de scène d’action possible.
Une entreprise comme les autres
Rétrospectivement, tout l’intérêt du film tient dans cette scène initiale de négociation commerciale, anodine au premier abord, entre un magnat du transport maritime et un entrepreneur japonais. La discussion permet à Peter Ludvigsen d’obtenir plusieurs millions en moins d’une heure. Plus tard, ce sont ces mêmes millions gagnés si aisément qui seront en jeu dans des transactions longues de quatre mois.
Le film se construit alors autour de conversations téléphoniques éparses. Toute la tension se cristallise autour de ces phases de négociation à distance, oscillant entre moment de stratégies, de dissuasion et d’intimidation.
Et comme dans un business classique, les deux interlocuteurs au bout de la ligne défendent leurs intérêts, avec souvent le même langage que celui de l’entreprise. Les pirates somaliens apparaissent alors de manière troublante comme un client comme un autre, une entreprise comme les autres.
ZOOM
Le regard porté sur les pirates somaliens
Ici, il n’y a ni bon ni mauvais. Les pirates ne sont pas présentés comme des Robins des bois œuvrant de manière charitable pour faire vivre leur village. En face d’eux, les Blancs ne sont pas les victimes propitiatoires de la barbarie : le PDG de la compagnie, gérant la vie de ses collègues avec la même froideur que les affaires quotidiennes, est d’ailleurs là pour le rappeler. Non, on a affaire à deux camps qui s’ignorent, qui ne partagent pas les mêmes codes et qui ne cherchent jamais à se comprendre.
Mention spéciale pour Omar, ce Somalien jouant le rôle génial d’un intermédiaire soi-disant captivé par les preneurs d’otage pour traduire les négociations. Perfide, truqueur, il symbolise le talent de tous ces acteurs amateurs admirablement mis en scène par Tobias Lindholm, un réalisateur à suivre.
Romain Dostes