Une vie de boy de Ferdinand Oyono
L’un des plus grands romans camerounais.
Décédé en 2010, Ferdinand Oyono a laissé avec Une Vie de boy un important témoignage sur la vie coloniale et sur les rapports de pouvoir, de domination et de fascination réciproque qui unissaient colons et colonisés.
Décrivant son Cameroun natal à travers les yeux d’un jeune garçon, Toundi, Oyono signe une œuvre satirique (qui ne dit pas son nom) en se jouant de la perception infantilisante des Blancs vis-à-vis des Noirs.
D’inspiration largement autobiographique, l’histoire du jeune Toundi débute par le départ du logement familial pour rejoindre la Mission catholique Saint-Pierre de Dangan. Comme pour mieux placer le lecteur dans le schéma habituel, cet incipit se construit autour de la fuite d’un monde brutal et sauvage, incarné par un père violent, vers un monde rassurant et civilisé (l’Eglise).
Mais au fil des pages, Oyono s’amuse à déconstruire cette vision sainte pour nous présenter un univers colonial oppressant (même si la vie y est décrite comme douce). Le père Gilbert qui l’accueille est visiblement un Homme bienveillant, généreux, que l’enfant admire et révère. Mais il perpétue les rapports inégalitaires et en fait son boy.
La mort du missionnaire et le départ vers la « Résidence », la ville des Blancs plongera définitivement le garçon, que l’on appelle Joseph depuis son passage chez les Catholiques, dans un rapport de soumission vis-à-vis de l’administration coloniale.
L’intérêt de ce roman réside justement dans cette description sincère d’un monde agréable mais inégalitaire, où les Noirs sont toujours perçus comme des êtres ignorants.
ZOOM
Ferdinand Oyono, auteur d’Une Vie de boy et diplomate
Parti de la petite ville d’Ebolowa, il sera tour à tour diplômé de droit à la Sorbonne puis intégrera l’ENA.
Il débute en 1959 une carrière de diplomate au cours de laquelle il sera nommé ambassadeur du Cameroun dans divers pays (à New York, en Algérie, en Libye, en Grande-Bretagne et en Scandinavie).
Romain Dostes