Juin 2013 / Films / Nigeria Ezra de Newton Aduaka Cinefacto et Arte France Procès fraticide d’un enfant-soldat.
C’est vrai, en règle générale, la rédaction d’Africavivre a un peu de mal avec les œuvres qui renforcent l’image d’une Afrique brutale et en proie à la guerre. Si c’est aussi votre cas, passez votre chemin et ne regardez pas Ezra. Et pourtant, passées les premières scènes de combat, le thème du film se révèle bien plus intéressant qu’il n’y paraissait. Car Ezra du nigérian Newton Aduaka est avant tout l’histoire d’un procès. Il pose à merveille une question bien embarrassante pour les juristes et pour les défenseurs des droits des enfants : comment juger un enfant qui a été enrôlé de force dans une milice et qui n’avait pas le contrôle de lui-même quand il a commis ses exactions ? Une trame familiale aux accents shakespeariens Sans révéler l’essentiel de l’intrigue, la beauté de ce film tient dans sa construction narrative et dans le drame familial qui se joue. Drogué et alcoolisé, Ezra tue ses parents sous les yeux de sa sœur. Le procès qui suit dans le cadre de l’opération « Vérité et réconciliation » les opposera dans un conflit fraticide au cours duquel la sœur d‘Ezra, meurtrie à jamais, devra surmonter ses remords et sa rancoeur. Certes, ce film manque parfois de répit et d’un peu de subtilité. Certes, il est souvent trahi par son manque de moyens et par ses faiblesses techniques. Mais tout cela est assez vite compensé par l’ambition de cette histoire aux accents shakespeariens et au travail d’acteur remarquable.
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ZOOM
Les enfants-soldats, un traumatisme chez les artistes africains
Manifestement, le recours aux enfants-soldats est un traumatisme chez nombre d’artistes africains.
On se souvient du personnage de Birahima dans le magnifique roman d’Ahmadou Kourouma Allah n’est obligé ou le roman Johnny Chien Méchant du congolais Emmanuel Dongala.
Le drame de Kourouma se situe au Libéria, pays où le recours aux enfants-soldats a été systématique et d’une violence inouie (ce que démontre très bien le film d’ailleurs).
Dans son roman, Emmanuel Dongala décide quant à lui de ne pas situer son Johnny dans un pays en particulier pour mieux insister sur cette dimension continentale et pour rappeler que la question des enfants-soldats est le drame de toute l‘Afrique.
Faire du thème des enfants-soldats une cause continentale, c’est aussi ce qu’a voulu Newton Aduaka, ce Nigérian si marqué par le conflit au Biafra et qui s’attaque ici, sans le dire explicitement, au conflit au Sierra Leone.
Romain Dostes