Jamm_de_Cheikh_LoAlbums / Sénégal
4_etoiles
Jamm
de Cheikh Lô
World Circuit
Du jazz à la kora : un album panafricain, très riche et très original.

 

Vous n'avez jamais entendu un Sénégalo-Burkinabé scatter ? C’est l’occasion avec Cheikh Lô !

Le premier titre, Conia, donne le « la » : une atmosphère jazzy, des tonalités éthiopiques, une intrigue de marabouts chantée en jula (dialecte mandingue du Burkina Faso).

L'album s'appelle Jamm : « paix » en wolof. Mais il est difficile de ne pas penser aux jam sessions, ces bœufs musicaux où chacun improvise le temps d'une rencontre instrumentale.

Cheikh Lô jamme autant avec les instruments que les styles et les ambiances musicales.

Un mélange à l'image du personnage : Ray Ban, interminables dread locks, casque colonial et njaxas, tenue traditionnelle multicolore des Baye Fall, confrérie mouride du Sénégal.

L’unité de ce patchwork musical, c’est sa voix. Une voix qui se marie aussi bien avec la kora qu'avec les guitares basses et le saxo, une voix qui raisonne dans une multitude de langues et d'histoires sans jamais perdre sa personnalité, une voix qui à beaucoup à dire, sans jamais sombrer dans le militantisme pur et dur.

Jamm jongle délicatement entre les différents mondes qu'il nous fait découvrir, un monde panafricain : les années 1970 au Congo sur Il n'est jamais trop tard..., un peu de Buena Vista sur Seyni, un Warico digne des plus grands koristes quand Dieuf Dieul nous amène à Touba pour une chanson traditionnelle sur les marabouts.

Un album à la fois « danka danka » (doucement en Wolof) et entraînant qui n'a pas fini de nous faire découvrir les richesses de la musique africaine.

ZOOM

Jamm et le cinquantenaire des indépendances : fruit du hasard ou hommage caché ?

« Le hasard vaut mieux que mille rendez-vous » dit un proverbe africain. Force est de constater que Jamm est sorti en 2010, année du cinquantenaire des indépendances Africaines.

Jamm est un album plein d’histoires (lire le livret du disque, très personnalisé, où Cheikh Lô nous ouvre un peu plus les portes de son univers et retrace l’enregistrement de cet album entre Bahia, Londres et Dakar) et d’Histoire (à travers le titre Sankara, ou encore la référence incontournable au Bembeya Orchestra sur Il n’est jamais trop tard…).

Bref, un véritable portrait de l’Afrique d’hier et d’aujourd’hui, d’Ouest en Est… et qui retrace sans doute le propre parcours de Cheikh Lô, de ses débuts à l’Orchestre Volta Jazz au Burkina Faso (son pays de naissance où il joue de la pop cubaine et congolaise), au retour au Sénégal entre les Baye Fall, le mbalax, Youssou N’Dour et encore bien d’autres influences… sans oublier son récent enregistrement en 2008, I Still Haven't Found What I'm Looking For qui est un véritable hommage à l’engagement du chanteur Bono (U2) en Afrique.

Anaïs Angelo