Documentaires / République Démocratique du Congo L'intégrale Zaïre-Congo (1ère partie) de Thierry Michel Cinélibre / Les Films de la Passerelle Mobutu, roi du Zaïre et Zaïre, le cycle du serpent: 2 documentaires remarquables (dont un dédoublé !) sur l'histoire commune d'un homme et d'un pays.
Zaïre, le cycle du serpent marque le début de l'histoire entre le Congo et le réalisateur Thierry Michel. C'est le premier film (1992) d'une série de trois autres à venir. Sauf que le réalisateur n'a pas lui-même idée de l'univers dans lequel il vient de plonger. « Une plongée dans le chaos », livre-t-il dans les suppléments.
Sept ans plus tard, le portrait qu'il fait de Mobutu, essentiellement à partir d'images d'archives, dans Mobutu, roi du Zaïrevient compléter le tableau congolais. Les deux films sont liés par la force de l'histoire : le Congo a fait Mobutu quand Mobutu a fait le Zaïre... Mobutu, roi du Zaïre Au départ, il y avait 1 000 heures d'archives. Finalement, Thierry Michel en a fait deux films, l'un en une série télé de trois épisodes; l'autre en un film de 2 heures, pour tenter de cerner l'extrême complexité de Mobutu, un personnage aussi cruel avec son peuple qu'il a pu être aimé de lui. A travers ces images et des interviews qu'il a lui-même réalisées, Thierry Michel a su saisir la détresse autant que l'engouement d'une population prise entre un jeu politique qui la dépasse et la volonté de se construire une histoire à travers « le père de l'indépendance ». Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu wa Za Banga est un homme aux multiples facettes : grand tacticien politique et médiocre stratège militaire, père de l'indépendance et dictateur, puissant chef d'Etat et homme de paille de l'étranger, homme du pouvoir et homme vaincu par son propre pouvoir... Autant de tensions en filigrane, irréductibles, insolvables, incessantes. Zaïre, le cycle du serpent Une tension qui se retrouve dans Zaïre, le cycle du serpent, qui doit presque être vu en complément de Mobutu, roi du Zaïre. Cette fois, c'est le visage du Zaïre qui apparaît au fil des rencontres avec ses différents sujets : nantis politiques, églises évangélistes versus églises catholiques, hommes révoltés et hommes impuissants... Une scène pourrait résumer l'interrogation que suscite ce film, une scène improbable voire absurde à nos yeux d'Occidentaux où des hommes minés par la polio et la misère sont contraints à la palabre de la mendicité... mais toujours prêts malgré tout à défendre à grands coups de louanges le Maréchal-Président. Fierté nationale, dictature pernicieuse ou fatale ignorance ? Le génie de Thierry Michel est de parvenir à filmer des images justes qui montrent sans pointer, et suggèrent sans délivrer aucune vérité. Ces deux films nous amènent à nous interroger sur des forces parfois profondément contradictoires mais qui continuent de tourner dans le même sens. A noter des images d'archives qui « rafraichissent » la mémoire sur les relations entre certaines de nos élites françaises et Mobutu. Zaïre-Congo : une histoire qui ne nous est pas tant étrangère. |
ZOOM
La fameuse toque léopard de Mobutu...
Surnommé « Le léopard de Kinshasa », Mobutu a fait de sa toque léopard l'emblème de son pouvoir et de son idéologie.
Lecteur de Machiavel, le léopard symbolise le pouvoir, la ruse... mais aussi la violence.
C'est en même temps un rappel au traditions bantoues, un signe d'authenticité pour celui qui se veut chef et président.
C'est peut-être aussi une référence (malgré elle?) au fez ottoman, qui fut largement porté par les soldats des colonies, notamment par la force publique belge au Congo.
Mobutu avait établi toute une doctrine vestimentaire : l'Abacost (« à bas le costume »), le port du costume et de la cravate était interdit au profit du veston d'homme, directement inspiré de la vareuse maoïste (mais qui paradoxalement, ressemble à la veste de l'administrateur belge !).
Anaïs Angelo