Films / Afrique du Sud Mon nom est Tsotsi de Gavin Hood UKFTV Un film sud-africain ravageur sur deux mondes que tout oppose.
Mon nom est Tsotsi est connu pour avoir été le premier film africain à recevoir un Oscar, en 2006, celui du meilleur film en langue étrangère. Cette langue si particulière est le tsotsi taal, argot des bidonvilles mélangeant anglais, afrikaans, zoulou, sésotho et isicamtho et parlé au cours de toutes les scènes tournées à Soweto, township de Johannesburg. Mais lorsque la caméra se déplace vers les quartiers résidentiels ou un poste de police, la langue change immédiatement. Et c’est bien ça le thème du film : à travers l’histoire de Tsotsi, jeune homme marginal de 19 ans, ayant pour seule famille une bande de voyous peu fiables, Gavin Hood dépeint une société où deux mondes se font face. Une plongée inquiétante dans l’univers des townships Entre les bidonvilles où vit Tsotsi et la banlieue pavillonnaire, il y a un vaste terrain vague, que lui et sa bande franchissent parfois le soir pour réaliser des braquages. L’enjeu est autant de s’enrichir que de fuir la vie dans les townships, un monde décrit comme misérable et violent. Mais n’est-ce pas l’image que l’on se fait de l’Afrique du Sud, lorsqu’on ne la connait pas, ou mal ? L’originalité de ce tour d’horizon sociologique est d’abord de dépeindre un monde sans solidarité, miné par la méfiance et la trahison permanentes. Un autre trait caractéristique de ces jeunes gens désœuvrés est d’être profondément amoraux, sans aucune empathie ni aucun critère dans le choix de leur victime : parmi elles, se trouvent d’ailleurs, tour à tour, un vieil homme, un autre en fauteuil roulant, une jeune mère de famille. Une romance subtile, sans effusion de sentiments Tout le mérite de Gavin Hood est d’avoir réalisé un film subtil, où la relation qui se joue entre Tsotsi et la jeune héroïne du film reste jusqu’au bout ambiguë et juste. La complexité du lien qui les unit n’est jamais résolue, tout comme d’ailleurs la relation entre le jeune gangster et la famille victime du rapt. Mon nom est Tsotsiest donc un film sur la captivité, celle d’une jeunesse engluée dans un monde d’extrême pauvreté qui ne laisse aucune perspective, celle d’une classe bourgeoise sans cesse sur le qui-vive et la crainte de l’agression. Le piège du clivage racial ou d’une description post-apartheid est ici évité : les confrontations concernent avant tout des Sud-africains noirs, les Blancs n’intervenant finalement que comme tiers, comme agents de police. Mon nom est Tsotsi est donc une excellente entrée en matière, touchante et haletante pour découvrir le cinéma sud-africain, en pleine effusion. Porté par une musique fiévreuse, entre house music et kwaito, et des acteurs simples et bien dirigés (en particulier le jeune Presley Chewenayagae), le film se met au service d’une histoire malheureusement quotidienne à Johannesburg. On pense forcément à La cité de Dieu, référence explicite au même titre que les romans du Sud-africain Athol Fugard. |
ZOOM
Un film adapté de l'unique roman du sud-africain Athol Fulgard
Mon nom est Tsotsi est adapté du roman Tsotsi de Athol Fulgard, publié en 1980, mais dont l'action est située dans les années 50.
Il s'agît de son seul roman à ce jour : ce dramaturge blanc est surtout réputé pour ses pièces de théâtre, régulièrement joués dans de nombreux pays.
Athol Fulgard, irlandais par son père et afrikaner par sa mère, pense qu'il n'est pas possible de raconter une histoire sud-africaine avec précision et sincérité sans qu'il en ressorte un caractère politique.